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Conte de Noël : Le miracle des cheminées

LE MIRACLE DES CHEMINEES de Simone RATEL                                 

C’était un soir de Noël comme on en voit sur les images. Sur la route, un petit ramoneur marchait à grands pas. La neige durcie criait sous ses semelles, et il marchait vite, portant sur le dos sa hotte; mais on aurait cru plutôt qu’il portait des ailes, tant sa démarche était légère.

Il se dirigeait droit vers le village, dont les lumières au loin semblaient promettre bon accueil au vagabond. Les lumières mentaient pourtant, car les gens de ce pays étaient avares et durs et, à cause de cela, on appelait leur village Maucoeur, qui veut dire mauvais coeur. Mais le ramoneur, sans doute, ne le savait pas. Arrivé à la première maison, qui était une belle ferme, il s’arrêta, leva le bras pour saisir le heurtoir de la porte.

La porte de la maison s’ouvrit brusquement. Et un grand et gros homme parut sur le seuil. Par la porte ouverte, on voyait flamber le feu, et une bouffée d’air chaud, qui sentait la dinde rôtie et le boudin grillé avec des pommes, vint caresser le ramoneur au visage.

 – c’est un petit ramoneur qui a froid, et qui a faim. Donnez-moi une place au coin du feu, un morceau de pain et je ramonerai vos cheminées.

– Au diable ! dit le fermier en refermant la porte. Allez mendier ailleurs. Nos cheminées n’ont pas besoin qu’on les gratte.

 Le ramoneur remonta sa hotte d’un coup d’épaule et s’en fut à la deuxième maison. C’était celle de l’épicière. Sa boutique était fermée, mais on entendait rire dans la pièce à côté et il y avait de la lumière. Quand le ramoneur frappa, il se fit un silence; puis une grande fille, longue et jaune comme une chandelle, passa son visage par l’entrebaillement de la porte.

– Que voulez-vous ? dit-elle.

– C’est un petit ramoneur qui a froid et qui a faim.

La porte, brusquement, lui claqua au nez, pas si vite cependant qu’il n’eût le temps d’apercevoir sur la table un beau gâteau glacé de rose éclairé par des bougies. Le ramoneur remonta sa hotte et continua sa tournée; il alla de maison en maison, frappant à toutes les portes et chassé de partout. Et, quand la porte de la dernière maison se fut refermée sur lui avec une injure, il se tourna vers le village, en secouant tristement la tête :

  Maucoeur, dit-il à voix haute, l’épreuve est faite, tu es un méchant village.

Et il levait la main dans un geste de malédiction, lorsqu’il sentit qu’on le tirait par la manche. Il baissa les yeux. Une petite fille était devant lui, toute blonde et pâle, et l’air hésitant :

 Monsieur le ramoneur, dit-elle, j’ai entendu que vous cherchiez un gîte et qu’on vous chassait. Voulez-vous venir chez nous? Ce n’est ni beau, ni grand, mais vous dormirez du moins à l’abri du vent, et je trouverai bien pour vous un croûton de pain et une tranche de lard.

 Le ramoneur à ces mots sourit, et parut si beau sous la suie qui recouvrait son visage, que la petite, émerveillée, n’osa souffler mot.

Les méchants, cette nuit, mangeront du pain noir, murmura-t-il comme pour lui-même, mais les bons mangeront du pain blanc.

Et, se tournant vers la petite fille :

Conduis-moi chez toi, dit-il d’une voix douce comme un chant.

Il lui prit la main et elle le guida vers une maison qui n’avait qu’un fenêtre; et la maison était si petite et la fenêtre si obscure qu’on pouvait passer devant dix fois sans les voir.

 – Mère, dit joyeusement la petite fille en entrant, le ramoneur veut bien venir chez nous.

 Une femme qui se chauffait à un feu de braises se retourna, montrant un visage pâle mais très doux.

 – Si j’étais riche, dit-elle, petit ramoneur, il y aurait pour toi de la brioche et du vin sucré, et tu dormirais sur un matelas de laine fine. Hélas ! je ne puis t’offrir que du pain dur, un peu de lard rance et une couche de paille; Mais c’est de bon coeur que je te les offre. Assieds-toi près du feu, repose-toi et mange.

– Pas avant d’avoir payé mon écot, dit le ramoneur. Je veux ramoner votre cheminée. Vous avez là un feu qui ne chauffe pas.

– Si j’avais de belles bûches, il chaufferait davantage, répondit la femme avec un triste sourire. Mais le feu est pauvre comme la maison.

– Laissez-moi faire, dit le ramoneur.

Et il disparut soudain dans la cheminée.

Pendant ce temps, la dinde avait achevé de rôtir dans la première ferme où le ramoneur avait frappé. On la posa sur la table, et le fermier, pour la découper, prit son couteau. Quelque chose de noir, tout à coup, se posa sur sa main.

– Tiens ? fit-il, étonné, une mouche en cette saison ?

 Mais voilà qu’il en vint une autre, puis une autre, puis une autre, un vrai nuage qui s’envolait de la cheminée.

 – C’est de la suie, pardi ! fit la fermière.

Le pain, déjà, en était tout noir ! La dinde en était criblée, et bientôt le nuage devint si épais que tous durent se précipiter au dehors, en danger d’être suffoqués.  » Au moins, si ce ramoneur de malheur était encore là ! » s’écria le fermier.

 En gesticulant, il se heurta à la grande fille de l’épicière, qui toussait, crachait, et toute la famille derrière elle, se lamentait sur le  beau gâteau rose tout gâté par la suie. Et, de tous côtés, les gens sortaient de leurs maisons où pleuvait la suie, en réclamant le ramoneur.

 – Je l’ai vu chez la veuve, dit une voix.

Tous, aussitôt, se précipitèrent vers la petite maison; c’était à qui arriverait le premier. Criant et se bousculant, ils poussèrent la porte, et ce qu’ils virent les cloua sur place, bouches muettes. De ramoneur, point. Et, là aussi, des flocons de suie volaient par la pièce. Mais, en se posant sur les murs, ils y tissaient une tenture couleur de soleil; et ils tombaient sur le sol, et on voyait briller un beau parquet verni ; un flocon plus gros que les autres s’abattit en tournoyant, et on vit se dresser à la place où il était tombé une table chargée du plus succulent des soupers. Puis les flocons noirs tombèrent dans le tablier de la petite fille, et ce furent des bonbons, des gâteaux et des jouets si beaux qu’ils ne pouvaient venir que du ciel ; et dans le tablier de la maman, ce furent des pièces d’or en cascade. Enfin, de grosses bûches s’empilèrent dans le foyer et lancèrent en s’enflammant  une lueur si triomphante sur toutes ces belles choses, que les assistants tombèrent à genoux en criant :  » Noël ! Noël !

 source : http://marie.roca.over-blog.com/article-26034434.html

Merci GBalland ! 😉

7 Commentaires

  1. Les miracles, ça ne fait pas de mal 😉
    Ce que je me passe à Noel, c’est Mary Poppins ; j’adore la danse des ramoneurs :https://www.youtube.com/watch?v=4QhgxRm9JXE

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    • Je n’ai jamais vu le film de Mary Poppins, à mon grand regret. Aller au cinéma n’était pas dans les habitudes familiales, dans le temps. Et puis le ciné d’ici diffusait, dans l’unique salle sombre, principalement des films « hot »… 😉
      Merci pour l’extrait joyeux !
      Dans le temps, mon père, jeune homme, n’était pas ramoneurs, mais travaillait sur les toits d’ardoise de Besançon. Et quand on voit l’inclinaison des toits !!!!…

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  2. Quel joli conte. Ah, comme cela fait du bien de lire de jolies histoires.
    Bonnes fêtes !

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    • Comme de bien entendu, j’ai pu en profiter la première. J’ai toujours adoré les contes. Il fut un temps, que pas un seul recueil tant de la bibliothèque municipale que de mon lycée n’échappait à ma lecture. Bonnes fêtes gentille Séraphine.

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  3. Merci Lou pour ce magnifique conte. Je l’ai lu avec bonheur.
    Douce soirée de la veille du Réveillon 🙂 Bisous

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    • Je sais, (enfin mon petit doigt m’a dit) que tu as aimé tous ces textes 😉 Encore un, avant la veillée… 🙂 Bonne soirée Denise, avant celle du Réveillon. ❤

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  4. Merci pour tes douces pensées Lou. Quel joli conte, comme cela fait du bien de rêver à un monde meilleur… Très belles fêtes de fin d’année à toi aussi, de la joie et de l’amour dans ton cœur et autour de toi. Bises étoilées. brigitte

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